On peut ainsi choisir un parfum de Noël ou, en été, des senteurs florales, fruitées. « La perception d’un espace varie énormément selon le parfum ambiant », explique Rainer Diersche. « Les ingrédients qui influent sur l’impression produite sont très divers. Les odeurs peuvent apaiser ou au contraire stimuler. Au fond, il s’agit de savoir si un parfum convient à une pièce ou à l’impression que produit cette pièce. Le plus souvent, on ne remarque l’importance d’un parfum que quand l’odeur dominante est désagréable. »
Effet sur l’inconscient
L’approche multisensorielle est encore rarement appliquée dans les maisons individuelles. On trouve des architectures synesthétiques principalement dans les hôtels, les boutiques ou les installations temporaires. Le marketing surtout s’appuie de plus en plus sur la psychologie et la neurologie. En conséquence, le comportement du consommateur n’est plus seulement influencé par la conception des espaces, mais aussi par les ambiances lumineuses, les parfums et la musique. Les neurologues observent par des procédés comme l’imagerie par résonance magnétique ce qui se passe dans le cerveau humain au moment des décisions d’achat. Le résultat est clair : la décision d’acheter obéit à des critères rationnels uniquement en apparence, car la véritable impulsion d’achat est déclenchée par des émotions et des atmosphères. Alors que tout ce que nous percevons à travers nos yeux est traité dans une zone relativement consciente du cerveau, les odeurs, le goût et aussi le sentiment suscité par les ambiances lumineuses agissent au niveau émotionnel, inconscient pour l’essentiel. C’est pourquoi quand on passe devant une boulangerie, même en sachant que l’odeur du pain à peine sorti du four est une astuce commerciale, ce parfum nous semble agréable et stimule notre appétit. Cela fonctionne que nous le voulions ou non. Parce que le nez fonctionne en permanence, même quand nous dormons. Il transmet constamment des informations olfactives directement à certains centres cérébraux, où les émotions et les atmosphères ressenties sont traitées.
« On ne devrait pas envisager le monde qu’avec nos yeux ouverts, mais avec nos narines ouvertes », déclare le professeur Hanns Hatt. Le titulaire de la chaire de physiologie cellulaire à l’Université de la Ruhr à Bochum est un expert reconnu pour ses recherches consacrées à l’olfaction, pour ses travaux de pointe sur les récepteurs olfactifs et l’effet des odeurs chez l’être humain. « Je recommande à chacun, quand il entre dans une pièce, non seulement de regarder mais de ‘sentir’ autour de lui. On découvre alors un monde totalement inconnu, qui n’est certes pas visible, mais qui nous entoure et nous influence. » Selon Hanns Hatt, l’odorat détermine considérablement notre perception spatiale, peut-être même plus que la vue. On sait aujourd’hui que les odeurs sont intimement liées à nos souvenirs d’enfance. La vanille ou la lavande peuvent inspirer des sentiments très authentiques de sécurité et de confiance, qui se trouvent associés à la situation présente, et donc à la pièce ou au produit. Il en résulte une association émotionnelle positive, dans la plupart des cas complètement inconsciente. L’utilisation de parfums reste délicate. « On pense souvent : beaucoup aide beaucoup », explique Hanns Hatt. « Mais c’est le contraire qui est vrai. En concentrations trop élevées, le parfum irrite les yeux et le nez. » Et la qualité des parfums est également décisive : « Certains parfums sont presque uniquement composés de solvants bon marché, mélangés à des matières odorantes synthétiques. En plus de notre système olfactif, ils excitent aussi le nerf trijumeau, associé à la douleur et au danger, donnant parfois des maux de tête ou la nausée. »